A l’occasion de la semaine de la QVT, le blog RH publie une série d’articles sur la question. Le premier aborde la question du lien entre performance et QVT en s’appuyant sur le résultat d’une enquête sociologique, effectuée auprès d’un acteur du secteur public, appliquant un accord relatif à la Qualité de Vie au Travail.
La Qualité de vie est l’indicateur du bien-être au travail. Chaque acteur (salarié, employeur, acteur institutionnel …) est légitime pour s’en saisir, pour en parler. Mais elle vient s’inscrire dans des contextes, des enjeux différents, notamment lorsqu’il est question d’encourager la performance sociale et économique d’une organisation.
L’utilisation de la QVT par les acteurs de l’entreprise peut faire naitre des tensions si les définitions sous-jacentes ne sont pas convergentes.
Nous présentons ici les résultats de notre enquête sociologique, effectuée auprès d’un acteur du secteur public pourvu d’un accord relatif à la Qualité de Vie au Travail.
Six entretiens ont été réalisés auprès de délégués du personnel, de la direction, ou encore des agents au sein de l’Etablissement étudié.
La QVT : une notion en équilibre entre performance sociale et économique ?
Un discours nouveau se développe dans les organisations autour de la thématique de la qualité de vie au travail. Ce discours trouve ses fondements dans les années 30 avec l’École des Relations humaines, et plus particulièrement les travaux d’Elton Mayo. Ceci correspond à une reconnaissance de l’importance du facteur humain pour favoriser la productivité et la performance des organisations. Il faudra attendre les années 70 pour que la notion de « qualité de vie au travail » soit énoncée pour la première fois. En France, son arrivée est devenue visible par la signature d’un accord national interprofessionnel, signé en 2013, puis d’un accord-cadre sur la QVT dans la fonction publique, signé en 2016. Il est alors écrit dans le préambule de l’accord de 2013 que :
« La qualité de vie au travail désigne et regroupe sous un même intitulé les actions qui permettent de concilier à la fois l’amélioration des conditions de travail pour les salariés et la performance globale des entreprises, d’autant plus quand leurs organisations se transforment. »[1].
Autrement dit, nous pouvons voir, à travers cette définition, la façon dont la QVT articule les sphères économique et sociale. Elles ont pourtant, à première vue, des objectifs et des enjeux opposés.
La QVT : entre subjectivité des salariés et performance de l’organisation
Parler de qualité de vie au travail n’est pas anodin. C’est une démarche nouvelle qui vient poser la question du « bonheur » au travail, là où le travail, dans ses origines latines (tripalium) désigne un instrument de torture, et évoque l’idée de souffrance associée au travail. Insérer ce sujet de « bien-être », et de « bonheur » au travail, représente donc en soi un paradoxe.
La QVT vient s’inscrire dans des attentes nouvelles des salariés, dans de nouvelles façons de concevoir le travail, non plus comme simple moyen de subsistance, mais comme possibilité de réalisation de soi et lieu d’épanouissement personnel, mais aussi de la part des entreprises comme moyen d’obtenir plus de performance.
Dans son article 1, l’ANI définit la QVT
« comme un sentiment de bien-être au travail perçu collectivement et individuellement qui englobe l’ambiance, la culture de l’entreprise, l’intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, un droit à l’erreur accordé à chacun, une reconnaissance et une valorisation du travail effectué. Ainsi conçue, la qualité de vie au travail désigne et regroupe les dispositions récurrentes abordant notamment les modalités de mises en œuvre de l’organisation du travail permettant de concilier les modalités de l’amélioration des conditions de travail et de vie pour les salariés et la performance collective de l’entreprise. Elle est un des éléments constitutifs d’une responsabilité sociale d’entreprise assumée »[2].
Une grande part est laissée à la subjectivité et aux ressentis des personnes. Il s’agit d’une certaine façon d’être heureux sur son lieu de travail. Le salarié n’est plus seulement centré sur son travail, l’employeur vient s’intéresser à lui en tant que personne ayant une individualité propre et des sentiments.
LA QVT, une notion prise dans des jeux de langage
La QVT peut être partagée entre la direction, les organisations syndicales et les salariés. Chacun essaye de déplacer la définition de la QVT sur son propre périmètre d’action et ses propres enjeux.
En effet, pour un représentant du personnel, la QVT peut lui permettre de porter son action sur des thématiques variées telles que la souffrance, le bien-être, ou encore les conditions de travail de façon plus générale. La QVT, selon les syndiqués interviewés, a pour objet le travail des salariés.
Cela signifie qu’elle doit donner les moyens aux salariés de se réaliser dans leur travail, en ayant des perspectives d’évolution par exemple.
Certains employeurs se sont dotés d’un accord spécifique à la QVT dans leur entreprise. Ces accords font généralement le lien avec celui de l’accord interprofessionnel. Pour un employeur, par exemple, l’objectif peut être de garantir des conditions de travail optimales à leurs salariés (locaux ergonomiques, innovants, mise en place du télétravail, avantages sociaux etc.) dans l’objectif de les fidéliser, de les motiver et in fine d’augmenter la performance de l’entreprise (par exemple, en réduisant le nombre d’arrêts maladie, en limitant le taux de turn over etc.)
Pour les agents rencontrés lors de cette enquête, nous avons relevé que la QVT peut être comprise comme un état d’esprit, une posture, ou encore une démarche qui consiste à prendre en compte les relations humaines dans un climat de partage, d’information, de prise en compte des attentes des collaborateurs. Cette importance de donner du sens au travail, revient de façon récurrente dans le discours des sondés. La QVT s’inscrit donc dans une démarche ayant pour finalité de favoriser les relations humaines. Aucun des sondés n’associe la QVT à la thématique de la souffrance au travail. Seules les terminologies positives (écoute, bienveillance, respect etc.) sont préférées.
Les notions autour de la qualité de vie au travail sont donc comprises différemment en fonction des acteurs, selon leur expérience, leur histoire, ou encore leur place dans l’organisation. L’absence de définition concrète de la QVT dans un accord, permet à chacun de s’en approprier le sens. Or, les attentes ne seront pas les mêmes. Il y a d’une certaine façon deux champs qui entrent en tension avec une volonté d’allier le champ économique et social bien que les visées puissent être opposées.
Ainsi, l’adoption d’un discours relatif à la QVT est le fruit d’une stratégie pour chacun de ces acteurs, en fonction de ce qu’il souhaite obtenir. Ces derniers sont pris dans des jeux de langage qui viennent structurer leurs rapports sociaux.
Par exemple, le sujet de la QVT peut devenir une source de conflits. Elle a notamment été qualifiée de « fumisterie » par les organisations syndicales qui auraient souhaité donner une autre dimension à ce sujet, que celle proposée par l’Etablissement.
La difficulté de ce type de politique est de donner des moyens à la hauteur des mesures votées, des indicateurs pour les évaluer, ainsi qu’une temporalité. Outre les mesures plus abstraites relatives au sens, à la reconnaissance au travail et dont les effets sont difficilement visibles et mesurables, s’appuyer sur des mesures plus concrètes, voire innovantes, peut permettre de montrer les effets positifs de la QVT, et les moyens mis par l’organisation pour y parvenir. La communication sur ces sujets, ainsi que la médiation entre les acteurs de l’entreprise restent donc fortement recommandées.
L’enjeu de la QVT demande de faire preuve de pédagogie en communiquant sur la philosophie de l’accord et sur tout ce qui n’est pas visible de prime à bord comme le sens, ou encore la reconnaissance au travail. Wavestone peut vous accompagner tant dans l’écriture d’un accord, que dans sa mise en œuvre.
Wavestone peut apporter un appui dans la définition d’un accord et sur sa négociation avec les partenaires sociaux en tirant profit de :
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[1] Site de l’Anact. 10 questions sur la qualité de vie au travail. Disponible sur : https://www.anact.fr/file/2866/download?token=51Qt_Jb0
[2] In « Accord national interprofessionnel du 19 juin 2013 vers une politique d’amélioration de la Qualité de Vie au Travail et de l’Egalité Professionnelle ». Disponible sur : [https://www.journal-officiel.gouv.fr/publications/bocc/pdf/2013/0041/boc_20130041_0000_0011.pdf]
Auteur
Marion HEYMES GRIMAULT – Consultante |
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Pour plus d’informations, vous pouvez contacter : Sabrina YOUNSI YUTH – Senior Manager |