La loi de finances rectificative du budget 2012 a finalement été votée le 31 juillet 2012. Parmi d’autres mesures d’ordre social, elle met fin notamment à la défiscalisation des heures supplémentaires des salariés du secteur privé mise en place en août 2007 (Loi TEPA) et sonne ainsi le glas du « Travailler plus pour gagner plus », slogan phare de la campagne du candidat Sarkozy il y a tout juste 5 ans.
Mesure hautement symbolique ?
Probablement, mais pas uniquement, affirme le gouvernement.
Le dispositif TEPA, pour rappel, exonérait de l’impôt sur le revenu et de la totalité des charges patronales toute heure supplémentaire dûment déclarée. Son coût global était estimé à environ 5 milliard d’euros par an à l’état entre remboursements de cotisations et manque à gagner fiscal ; sa suppression entraînerait un gain de recette équivalent à environ un milliard d’ici la fin de l’année, selon les propos du gouvernement.
Qu’en est-il concrètement en termes d’emploi ?
La politique de défiscalisation répondait au projet du gouvernement Fillon d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés qui souhaitaient augmenter leur temps de travail. De ce côté, la réussite a été indéniable et on a pu compter une moyenne d’augmentation de 500 euros pour les salariés qui effectuaient des heures supplémentaires et qui bénéficiaient donc complètement du dispositif. Le point négatif, selon les syndicats et l’opposition de l’époque aujourd’hui au pouvoir, concerne le freinage des embauches : les employeurs auraient effectivement eu plus tendance à répartir le travail sur leurs salariés présents afin de bénéficier d’une exonération de charges patronales plutôt que de chercher à embaucher.
Le nouveau dispositif supprime donc d’un côté l’exonération de l’impôt sur le revenu sur toute heure supplémentaire dûment déclarée comme telle. En ce qui concerne les charges patronales, seules les entreprises de moins de 20 salariés, catégorie majoritaire au sein du dispositif (43% du volume total des heures effectuées en 2010 selon le rapport des députés Jean-Pierre Gorges et Jean Mallot), vont continuer à bénéficier de la défiscalisation.
Donc finalement, quel intérêt à réformer ?
Nous avons déjà évoqué l’aspect symbolique de cette loi. Par ailleurs, le ministre du travail y voit principalement une mesure de Justice sociale en ce que l’ancienne loi ne concernait pas les non-salariés ou les salariés à temps partiel. Il propose ainsi une compensation pour les salariés qui seraient désormais exclus de la défiscalisation : la concertation sociale prévue à l’automne devrait apporter une augmentation de la rémunération des heures supplémentaires. Enfin, le gouvernement espère, par effet de miroir avec l’ancien dispositif, relancer l’embauche en incitant les patrons à créer des emplois plutôt qu’à confier des heures supplémentaires à leur personnel en place.
Mais la loi n’est pas encore officiellement là. La promulgation a bien eu lieu, mais l’application est pourtant l’instant conditionnée à la délibération du Conseil Constitutionnel : saisi par des députés et sénateurs de l’opposition, la haute autorité administrative doit statuer sur une Question Prioritaire de Constitutionnalité visant à déclarer inconstitutionnelle la nouvelle loi. D’une part c’est son caractère rétroactif qui est contesté : en effet, la loi concerne les heures effectuées à partir du 1er août mais ne sera mise en place que quelques semaines plus tard. D’autre part, elle opérerait selon l’opposition une rupture du principe d’égalité entre salariés : ceux qui effectuent des heures supplémentaires après le 1er août seront fiscalisés mais pas ceux qui en ont effectué avant cette date, pourtant sur le même exercice fiscal.
Le Conseil Constitutionnel devrait rendre sa décision au mois de septembre.
Auteur: Nicolas Negrilic, RH-Management