À partir du 1er juillet 2021, la durée du congé paternité passe de 11 à 25 jours.
Avec cette mesure, l’Elysée se félicite de “faire passer la France d’une position médiane au peloton de tête des pays européens les plus en avance, aux côtés de l’Espagne, de la Finlande, de la Norvège et du Portugal”.
L’allongement du congé paternité est une avancée sociale indéniable. Cette mesure, mise en place par le Gouvernement, répond à deux objectifs principaux :
- Permettre un meilleur développement des enfants, dans le cadre des mesures prises pour accompagner les parents lors des 1 000 premiers jours de l’enfant [1] , en permettant au second parent d’être plus présent pendant ses premiers jours
- Instaurer plus d’égalité entre les femmes et les hommes, en contribuant à un rééquilibrage des tâches domestiques et parentales entre les parents.
Mais alors, dans quelle mesure ces objectifs vont-ils être remplis ? Le congé paternité est-il un instrument au service de l’égalité femme/homme ?
Les faits
À partir du 1er juillet 2021, la durée du congé de paternité est portée de 11 à 25 jours.
Le congé comporte 2 périodes distinctes suivantes :
- 1 période obligatoire de 4 jours calendaires prise immédiatement après la naissance de l’enfant
- 1 période de 21 jours calendaires non-obligatoires
La CPAM verse des indemnités journalières (IJ) dont le montant est fixé à environ 80% du salaire de l’employé, et ne pouvant pas être inférieur à 9,66 € par jour ni supérieur à 89,03 €. Ces indemnités sont très similaires à celles du congé maternité.
Cependant, si l’on compare la durée des congés, la différence avec le congé maternité est encore grande :
Une avancée pour l’égalité HF qui doit être poursuivie
D’une part cet allongement du congé paternité est une réelle avancée sociale. Les 4 jours calendaires obligatoires vont permettre aux pères de rester et d’aider les jeunes mamans au cours de la première semaine après l’accouchement, qui est très souvent une période épuisante physiquement et psychologiquement. Cela peut également inciter les jeunes papas à recourir aux 21 jours restants de leur congé paternité non obligatoires. Cela permettrait d’atteindre la cible des 80% de pères / conjoints qui recourent à l’entièreté de leur congé paternité d’ici 2022. Avec les 11 jours non obligatoires actuels, le taux de recours est seulement de 67%.
Cet allongement peut indéniablement soulager la mère de la charge parentale et domestique durant le mois suivant son accouchement. L’égalité femme-homme connait donc une avancée au niveau de la charge parentale et de la charge mentale durant le premier mois.
Mais il reste encore beaucoup à faire pour que ce congé paternité soit un instrument d’égalité femme-homme en matière d’égalité professionnelle.
Pour avoir un véritable effet sur le marché du travail, il faut repenser l’accueil des jeunes enfants jusqu’à leur scolarisation. En effet, après la période du congé maternité-paternité, il reste encore deux ans et demi avant la scolarisation des enfants. Ces années essentielles au développement de l’enfant sont encore très insuffisamment prises en compte. Trop souvent ce sont les femmes qui vont « sacrifier » leur carrière professionnelle en reprenant seulement à temps partiel ou en changeant d’activité professionnelle.
De même, durant la fin de la grossesse, le soutien du futur papa peut être essentiel pour réaliser un bon accouchement. Cet allongement de congé paternité ne s’est pas fait en amont de la naissance mais seulement en aval. 2 papas sur 10 n’assistent pas à l’accouchement.
Les 14 jours de congés paternités en plus disponibles dès le 1er Juillet 2021 sont une avancée sociale qui encouragera l’égalité femme-homme lors de la naissance de l’enfant. Cependant cet allongement ne résout pas l’inégalité parentale femme-homme dans tout le processus de l’accueil d’un enfant de ses 0 à 3 ans.
Le rôle de l’entreprise dans tout ça
Face aux inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde du travail, cette nouvelle mesure aura un impact sur la culture des organisations. Ce sera peut-être le rôle des entreprises d’encourager les pères à prendre les 21 jours non-obligatoires pour qu’ils ne subissent pas de pression mentale ou de préjugés de l’environnement de travail. Cette pression est encore aujourd’hui trop ressentie, principalement pour les employés en contrat précaire, où le taux de recours au congé paternité est très faible. Les entreprises pourront clairement se différencier les unes des autres en suggérant ou non de prendre ces jours de congé paternité.
Grâce à cet allongement, les congés pour s’occuper des nouveaux nés ne peuvent plus être associés uniquement aux mères car cela mène inexorablement à de nombreuses inégalités. Notons notamment les discriminations à l’embauche qui en découlent : il a déjà été demandé à 37% des femmes lors d’un entretien d’embauche si elles comptaient avoir un enfant [2], question interdite par la loi. Alors va-t-on demander aux hommes également s’ils comptent avoir un enfant ?
En conclusion, la durée du congé paternité, qui passe de 11 à 25 jours au 1er Juillet, est une réelle avancée sociale pour un meilleur développement des enfants et une égalité femme-homme au cours du premier mois suivant la naissance. Cependant il y a encore un long chemin à parcourir pour que cette égalité se ressente dans le monde professionnel.
[1] Rapport de la commission sur les « 1.000 premiers jours de l’enfant » présidée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik remis mardi 22 septembre 2020 au secrétaire d’Etat à l’Enfance et aux Familles, Adrien Taquet.
[2] Enquête Ifop, 2017
——- | Elise VACEK – Consultante | |
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