La formation professionnelle vit sa nouvelle réforme. Celle-ci contient, entre autres, un renforcement du compte personnel de formation (CPF), qui permettra aux salariés de cumuler davantage d’heures de formation (35 heures au lieu de 24, dans la limite de 400 heures au lieu de 150), une absorption dans le CPF du congé individuel de formation (CIF), un dispositif notamment dédié aux reconversions, un financement spécifique pour le conseil en évolution professionnel (CEP) et une réforme de l’alternance…
La réforme est un enjeu pour le collaborateur : elle soutient le concept de flexisécurité au sens que la formation professionnelle continue doit devenir demain un véritable atout sur le CV du salarié qui permette à celui-ci d’être plus agile dans le pilotage et la valorisation de ses compétences et donc de son employabilité.
Ce sera un atout pour le collaborateur mais encore faut-il l’aider à en prendre conscience. Dans certaines entreprises, il est donc temps de créer une dynamique si ce n’est déjà fait pour mettre en place des sessions de formation ou de sensibilisation à comment la réforme encadre et fait évoluer l’employabilité et incite à savoir piloter son parcours de formation pour se former sur les compétences qui ont une valeur sur le marché du travail.
L’enjeu pour l’entreprise n’est pas tant d’expliquer au salarié toutes les évolutions techniques du financement de la formation que de paraitre comme l’interlocuteur privilégié, si possible unique, du salarié lorsque celui-ci demain sera à même de décider seul de comment il investira son crédit en offres de formation (exprimé à l’avenir en euros et non plus en heures, pour rendre la démarche plus concrète).
En effet, le salarié aura le choix de comment il investit dans sa formation et tout l’intérêt pour l’entreprise sera de proposer une offre de formation attractive (d’où l’essor des formations qualifiantes et certifiantes) qui n’inciteront pas le salarié à se tourner vers d’autres offres de formation externes à l’entreprise. L’entreprise cherchera à capter les deniers du salarié et ainsi à générer un circuit retour des sommes qu’elle aura engagées et investies en des formations valorisantes. Si elle ne le fait pas, l’entreprise verra le salarié consommer sa formation ailleurs, auprès d’autres structures qui auront mieux capté son besoin ou séduit par des formations plus attractives au regard de son projet individuel, pendant que l’entreprise peinera en parallèle à disposer pour ses besoins opérationnels de collaborateurs qualifiés sur les compétences qu’elle recherche ou aurait pu prétendre à développer en interne.
Pour l’entreprise, au travers la mise en place d’actions de sensibilisation à venir sur le bénéfice du salarié à piloter sa formation, il s’agira d’honorer une responsabilité employeur vis-à-vis du salarié consistant à proposer un accompagnement dans sa bonne compréhension de l’évolution du marché de l’emploi, du rôle qui sera donné à la formation comme un vecteur fort d’employabilité future et par conséquent faire mieux passer les prochains projets de transformation de l’entreprise qui feront varier à la hausse ou à la baisse, des effectifs qui devront se repositionner sur le marché du travail.
Sur le fond, si on considère que la définition données à l’employabilité traduit mal l’idée d’une adéquation entre compétences proposées et attendues, pour correspondre parfois davantage à la capacité d’un candidat à être attractif et à maitriser la perception qu’il renvoie à son futur employeur, la réforme doit quant à elle davantage permettre de valoriser l’emploi-capacité qui traduirait l’adéquation entre les compétences que peut promettre un candidat au recrutement, sa capacité à faire et à produire de façon avérée, et les compétences dont l’entreprise cherche à disposer.
Une des questions ouvertes serait de déterminer si ce nouveau rapport à la formation et le dynamisme que la réforme ambitionne d’insuffler, permettront entre autres d’amener les salariés à se développer sur les ressources les plus rares dont l’entreprise peine dans certains cas à développer en des effectifs suffisants et évolutifs aux évolutions en cours de l’activité salariée (compétences en digital, IA et autres data sciences …)
Marc Godard, Manager People & Change