Dès les années 80, Chris Argyris et Schön, dans Savoir pour Agir, développe l’idée de l’apprentissage en simple et double boucle.
Pour eux, le frein principal à l’apprentissage se résume dans une notion : celle des routines défensives. Ces routines défensives empêchent l’ouverture et le débat nécessaire pour solutionner les points de blocage. Kurt Salmon a pu rencontrer dans ses missions de conduite de changement dans le cadre de déménagement notamment ces routines défensives : la création d’un « chez-soi » au travail. Le collaborateur crée ses repères : il travaille dans le même bureau, avec des collègues qu’il a appris à apprécier dans un quartier plus ou moins proche de sa résidence de vie. Ces routines de défense posées, le travail devient faisable plus sereinement.
Notre collaborateur suit alors un apprentissage en simple boucle : il développe un comportement individuel (théorisé par le modèle 1) pouvant se simplifier par un « je fais – je retiens » et « je fais mal – je rectifie ». Nous pouvions lire entre les lignes des interviews d’analyse de l’existant : « Je vois que mon institut n’a pas de vraie culture d’entreprise car le CE n’existe pas, je retiens donc que mon entreprise c’est le bâtiment en lui-même : il est le ciment de mon sentiment d’appartenance»…et donc « si je déménage de bâtiment, c’est comme si je démissionnais ».
L’individu défend ici une conduite qu’il pense rationnelle à son niveau et qu’il va utiliser dès qu’un évènement nouveau ou inconnu se présente à lui : il assimilera les transformations organisationnelles de manière restreinte et limitée. Par ailleurs, les syndicats sont souvent les relais de ce genre de comportement.
A contrario, les chercheurs développent l’apprentissage en double boucle où le collaborateur peut apprendre de l’organisation et où l’organisation peut apprendre de l’individu. Imaginons un moment que le responsable du collaborateur qui associe son institut à son bâtiment ait compris l’amalgame et qu’il se soit dit : « Pourquoi ne pas utiliser nos associations pour développer des activités qui s’apparentent à celles que propose un CE classique ? » Nous serions alors au cœur du modèle 2 qui met en exergue un raisonnement défensif et constructif.
Ainsi, si l’individu peut comprendre les messages envoyés par la transformation de l’organisation (les nouvelles pratiques, le nouveau outil de travail), l’organisation peut également apprendre des réactions des individus pour réajuster leurs actions et donc aider les individus dans leur assimilation du changement.
C’est à ce niveau que Kurt Salmon a essayé de réfléchir à des pratiques de conduite du changement innovantes qui créent une inférence destinée à faire le lien entre la compréhension de l’individu et la réalité de la transformation. L’outil développé fut les ateliers d’expression. Fonctionnant comme des réunions informelles autour de thème définis (le temps de transport, la vie sur le nouveau site…), lieu d’échange et de parole libre, le but est de faire naître ce lien pour dégager une proposition d’actions de conduite du changement directement applicables (la création d’une charte par exemple). Le résultat, avec le temps, est une appropriation du nouveau bâtiment mais surtout du nouvel institut que ce bâtiment symbolise. C’est à ce niveau que les ateliers ont été efficaces : les collaborateurs ont pensé différemment pour voir l’avenir de leur métier.
Place donc aux innovateurs du change pour créer des outils générateurs de boucles !
Auteur : Vijaya, Myriam, Consulante, RH-Management