A l’approche des élections présidentielles et des élections professionnelles nationales, le projet de loi travail fait toujours l’objet d’une forte médiatisation. C’est dans ce contexte que le Cabinet Jeantet Associés nous a conviés ce vendredi 24 Juin pour une conférence-débat autour de ce sujet. Face à un public divers composé d’avocats, de professionnels RH mais aussi de journalistes, Monsieur Patrick Thiébart et Madame Déborah David, tous deux Associés au sein du pôle Social, ont présenté avec pédagogie les principaux aspects du projet de loi El Khomri.
Sur le fond, et sans que cette liste se veuille exhaustive, il fut notamment discuté de la nouvelle architecture du code du travail en trois strates. La première strate serait composée des dispositions d’ordre public auxquelles il ne sera, par principe, pas possible de déroger en défaveur des salariés. La deuxième serait constituée par le fruit des négociations collectives au niveau de l’entreprise. Enfin, un niveau supplétif s’appliquerait en l’absence d’accord.
Pour autant, le projet de loi, contrairement aux idées reçues, ne remet pas en cause la hiérarchie des normes existantes. Si le champ des accords d’entreprise est élargi, c’est uniquement parce ce que la loi le permet. De surcroît, les accords de branche gardent une compétence exclusive et prévalent donc sur les accords d’entreprise sur de nombreux sujets tels que les salaires et les classifications.
Le projet de Loi apporte également des modifications quant aux modalités de validation des accords d’entreprises avec l’avènement de l’accord majoritaire. Jusqu’à présent, la validité des accords était subordonnée à leur signature par l’employeur et une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant obtenu au moins 30% des suffrages aux dernières élections professionnelles. Dorénavant, une majorité de 50% serait exigée. A défaut, l’accord minoritaire devrait être approuvé par la majorité des salariés, au travers d’un référendum d’entreprise.
Cette disposition laisse sceptique au regard des contraintes logistiques découlant de la mise en place de ces référendums mais surtout au regard de la difficulté d’obtenir des accords fondés sur un large consensus.
Par ailleurs, le projet de loi crée un nouveau cas d’accord collectif pour favoriser la flexibilité des entreprises : l’accord de préservation et de développement de l’emploi. Contrairement à l’actuel accord de maintien de l’emploi, cet accord ne requerra pas la constatation d’une dégradation de la situation économique de l’entreprise dans la mesure où cette dernière pourra demander des efforts à ses salariés – sans diminuer la rémunération annuelle – pour, par exemple, conquérir de nouveaux marchés. Il est intéressant de noter que des « efforts proportionnés » à ceux sollicités des salariés pourront être demandés aux dirigeants et actionnaires.
D’autres mesures ont été discutées, notamment celles relatives à la durée du travail et à la sécurisation des forfaits jours. L’abandon de la notion d’avantages individuels acquis comme ceux relatifs aux droits au repos et aux droits familiaux illustrent la grande diversité de sujet de cette réforme.
En conclusion, le projet de loi Travail, en donnant davantage d’importance au dialogue social, poursuit l’ambition portée successivement par la loi de sécurisation de l’emploi de 2013 et par la loi Rebsamen de 2015. Ce projet conforte également la légitimité de la négociation d’entreprise, en confiant l’élaboration de la norme juridique à ceux chargés de la mettre en œuvre.
Auteur : Guillaume Duchesne, Business Analyst