L’établissement d’un système de rémunération des dirigeants doit se comprendre au-delà du contexte interne des entreprises. Ces pratiques sont perméables aux avancées règlementaires du législateur.
Cet article vise à donner des éléments de contexte règlementaire afin de mieux mettre en perspective l’évolution des pratiques des entreprises du CAC 40 en matière de rémunération des dirigeants.
Les pratiques de rémunération face aux évolutions du cadre règlementaire
La multitude de scandales liés à la rémunération des dirigeants (indemnités de départ de Jean marie Messier chez Vivendi, stock-options chez EADS…) du début des années 2000 ont eu pour effet d’émouvoir l’opinion et de faire réagir les pouvoirs publics.
Diverses lois furent votées afin d’améliorer la transparence des informations sur la rémunération des dirigeants et de la soumettre à des critères de performance. Avec cette évolution règlementaire, le législateur vise à influer sur les pratiques en matière de rémunération mais n’entend pas réguler de façon dirigiste et contraignante les mécanismes de rémunération des grands patrons. Parallèlement aux lois votées par le Parlement, les organismes professionnels MEDEF et AFEP ont publié un code sur la bonne gouvernance dont l’objectif est de pousser les entreprises à s’engager sur la voie de l’autorégulation.
Sur le plan législatif, le Parlement a voté plusieurs lois allant dans le sens d’une meilleure gouvernance en matière de rémunération des dirigeants. L’article 116 de la loi NRE (Nouvelles Régulations Economiques), votée en 2001, fixe l’obligation faite aux sociétés cotées en Bourse de publier dans leur rapport annuel des informations sur la rémunération des dirigeants. Cette loi fût renforcée par la loi Breton de 2005 qui oblige ces entreprises cotées à détailler dans leur rapport annuel les éléments fixes, variables et exceptionnels de la rémunération des dirigeants ainsi que les avantages sociaux et les circonstances en vertu desquelles ils ont été établis.
La loi TEPA de 2007 va plus loin en cela qu’elle fait le lien entre rémunération des dirigeants et performance des entreprises. En somme, cette loi oblige les conseils d’administration à soumettre l’attribution d’une rémunération à des critères de performance préétablis.
Cependant, la loi ne définit pas ces critères de performance et la jurisprudence n’en a pour l’instant fait aucune interprétation. De fait, les entreprises ont toute la liberté d’apprécier eux même ces critères dans le cadre de l’attribution de la rémunération des dirigeants.
C’est donc plus dans une logique d’autorégulation que s’inscrit l’évolution juridique de ces 10 dernières années. Cette évolution s’accompagne d’une réglementation non contraignante qui entend établir un certain nombre de recommandations déontologiques sur le sujet de la bonne gouvernance des entreprises.
Le code AFEP-MEDEF aborde de nombreuses problématiques liées à la gouvernance des entreprises : les indemnités de départ, l’attribution d’options et d’actions suivant des indicateurs de performance, la transparence de l’information, le non cumul entre mandat social et contrat de travail…
L’ensemble des entreprises du CAC 40 ont adhéré à ce code mais il est difficile de savoir si les recommandations du code AFEP-MEDEF sont correctement appliquées partout. Le rapport annuel 2010 de l’AMF sur la rémunération des dirigeants avance que les entreprises adhérentes au code ont fait des progrès conséquents en matière de transparence de l’information mais qu’une grande majorité ne communique pas sur quels critères de performance est établie la rémunération des dirigeants.
Auteur : Valentin de Turckheim, Consultant, RH-Management