Le 7 février dernier, le Cercle Humania, sous l’égide de l’Apec et de Kurt Salmon, invitait Michel Yahiel, conseiller Travail, Emploi et Protection sociale auprès du président de la République. Le thème de la soirée était : « Quels sont les enjeux sociaux de la compétitivité ? »
A travers cette thématique, d’une actualité brulante, Michel Yahiel a exposé aux quelques 86 directeurs des ressources humaines présents son analyse et sa perception du chemin parcouru au cours de ces derniers mois sur le registre social, sous le « parrainage actif » du président de la République et de son gouvernement. Limpide dans ses propos, prudent dans ses réponses, il a notamment dépeint la situation vécue « de l’intérieur », fait le constat des avancées réalisées (notamment suite à l’Accord National Interprofessionnel ratifié le 11 janvier dernier) et dressé un panorama de ses prochaines échéances.
L’équipe de Kurt Salmon RH-Management présente était constituée, pour la circonstance, de Claude Bodeau et Gilbert David, Associés, Philippe Renard, Senior Business Advisor, ancien Directeur des Ressources Humaines de l’armée de Terre, et Laurent Friedmann, Senior Manager.
Compétitivité et contexte social sont inextricablement mêlés, c’est la conviction de Michel Yahiel. Dès lors, le choix de recourir au dialogue social va de soi. Il a pu faire le constat de la sensibilité « religieuse » de l’opinion publique sur ce sujet. Cette orientation a suscité des réactions passionnées, multiples et variées, allant du scepticisme à l’hostilité.
Faire aboutir ces négociations n’était donc pas acquis. Au-delà des efforts qui ont été consentis de part et d’autre pour que l’Accord National Interprofessionnel (ANI) soit ratifié, Michel Yahiel expose les éléments qui ont contribué au dénouement positif que nous connaissons.
Il cite notamment la longue et minutieuse préparation « depuis de longues années » qui a prévalu à ces négociations. Cette préparation avait consisté à sensibiliser ou mobiliser en amont tous les partenaires susceptibles d’être impliqués dans le débat sur la sécurisation de l’emploi.
Il évoque aussi la difficile conjoncture « sans précédent » que nous traversons, qui a poussé chaque protagoniste à « prendre ses responsabilités ». Enfin, il note que la situation de gouvernance des instances qui ont pris part au débat sont (ou ont été), pour la plupart d’entre elles, en phase de transition. Il est concevable que les personnalités « fraichement arrivées » ou « bientôt partantes » aient pesé pour parvenir à un accord, marquant ainsi de leur empreinte leur rôle dans leur fonction élective.
Michel Yahiel replace la séquence de cette négociation collective dans l’optique plus large des préoccupations économiques et sociales du président de la République et du gouvernement lors de leur arrivée au pouvoir.
Il répartit les sujets critiques dans un carré imaginaire dont chaque sommet correspond à un enjeu majeur.
Le premier sommet du carré concerne l’Europe : l’impérative nécessité de trouver une solution aux dettes « abyssales » auxquelles doivent faire face bon nombre de pays de l’Union Européenne. Les risques que cette situation fait courir à la zone Euro, à l’Europe des 27 et à l’économie mondiale dans son ensemble. Il semble que les dispositions prises, depuis lors, aient éloigné les périls irréversibles que l’on augurait fin 2011.
Le second sommet de ce « carré des priorités » est consacré aux finances publiques françaises. Les « décisions courageuses » visant à réaliser 60 milliards d’économies sur le quinquennat devraient permettre un retour à l’équilibre.
Troisième sommet du carré : la compétitivité et les conclusions du « rapport Gallois » qui sont difficiles à faire entendre à certaines franges de la majorité actuelle.
Enfin, Le conseiller du président de la République évoque le quatrième et dernier sommet du carré, celui de la politique sociale qui a débouché sur l’accord du 11 janvier 2013.
Michel Yahiel démontre ainsi que toutes les grandes thématiques économiques et sociales urgentes marquant notre actualité ont été prises en charge et investies par le président de la République et son gouvernement. Il reste conscient que si des débuts de solution ont été mises en œuvre, le chemin à parcourir reste important.
Concernant la politique sociale, les principales étapes suivantes sont :
- l’actualité, avec la transposition de l’ANI en texte de loi et les débats qu’elle suscite,
- le futur proche, avec la retraite et les négociations AGIRC-ARRCO qui doivent aboutir en mars,
- la politique familiale,
- l’assurance chômage.
Michel Yahiel est bien conscient que le quinquennat ne suffira pas pour conduire à leur terme tous ces vastes projets.
La traditionnelle séance de questions / réponses a permis à Michel Yahiel d’aborder différents sujets périphériques. Il a, par exemple, évoqué les thématiques qui, dans les prochains mois, feront l’objet de débats impliquant les partenaires sociaux (retraite, formation professionnelle, bien être au travail, assurance chômage). Il s’est exprimé sur l’inscription du dialogue social dans la constitution ou encore sur la nécessité d’améliorer la qualité du service public. Il a expliqué la supériorité du Crédit d’Impôts pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE) sur une réduction de charges sociales en mettant en avant, d’une part, que le bénéfice retiré d’une diminution de charge est soumis à l’impôt sur les sociétés (ce qui n’est pas le cas d’un crédit d’impôts) et, d’autre part, que ce mécanisme fiscal lui permet de ne pas préempter la question du financement de la protection sociale qui doit être traitée ultérieurement.
La question posée par Kurt Salmon était consacrée à la prise en compte croissante, par la jurisprudence, des risques psychosociaux (RPS) dans la validation des plans de sauvegarde de l’emploi et le risque que cette thématique ne devienne un sujet central ralentissant l’aboutissement des redéploiements. Michel Yahiel estime qu’il est indispensable de prendre en compte cette dimension. Dans le prolongement de la retranscription de l’ANI, loi, décrets et jurisprudence se complèteront pour préciser comment chaque partie prenante devra tenir compte des RPS dans la conduite et le suivi d’un redéploiement.
Auteur : Laurent Friedmann, Senior Manager, RH-Management