« Nous simplifierons le droit du travail, nous permettrons aux entreprises de négocier au plus près du terrain », tels étaient les mots inscrits par Emmanuel Macron dans les premières pages de son programme de campagne. Depuis le candidat est devenu Président et ces mots se sont transformés en actes ou plus précisément en ordonnances.
Le 31 août 2017, le gouvernement présente 5 ordonnances pour renforcer le dialogue social dans les entreprises françaises. Comme les lois Rebsamen, Macron et El Khomri auparavant, ces mesures continuent de professionnaliser la méthode et les outils mis à disposition des DRH. Le véritable enjeu pour eux devient d’en maîtriser les règles complexes pour en dégager un maximum de bénéfices. La montée en compétence de tous les acteurs de la négociation collective apparaît dès lors comme une nécessité favorisant la croissance économique des entreprises et l’amélioration du climat social.
Qui pour aider à relever ce défi dans les entreprises ?
La réforme du droit du travail menée par la ministre de l’Emploi et de la Politique Sociale, Muriel Pénicaud vise tout particulièrement « à trouver des solutions innovantes pour articuler efficacement performance sociale et performance économique […] », celles-ci devant se faire au plus près du terrain « par un dialogue entre les acteurs directement concernés, dans un cadre souple et protecteur ». Plus précisément, l’article 1 du projet de loi vise à « reconnaitre et attribuer une place centrale à la négociation collective d’entreprise » et ce, en élargissant son champ d’action. Ainsi, il appartient aux acteurs de l’entreprises de déterminer conjointement les règles selon lesquelles ils entendent régir leurs relations de travail dans la limite bien sûr, des règles d’ordre public, leur permettant ainsi de mieux décider de leur sort et de traiter chacune de leurs spécificités par la voie du dialogue social.
Cette évolution vers une négociation plus proche du terrain fait émerger un nouvel enjeu pour les entreprises : celui de donner un cadre clair et partagé aux négociations. En effet, au-delà de la compréhension des sujets, la fonction RH à qui les règles de la négociation étaient en partie légalement imposées, doit dorénavant jouer un rôle de chef d’orchestre au sein de l’entreprise en accompagnant les différentes parties prenantes pour proposer un cadre général à la négociation collective et aider à son implémentation et son appropriation. Elle devra, de manière innovante, mettre en œuvre et adapter à son écosystème cette réforme pour faire progresser l’entreprise.
Il devient donc impératif pour les entreprises d’utiliser les moyens mis à disposition par la loi pour fixer les conditions de la négociation collective. Un outil appelé « accords de méthode » existe depuis plusieurs années dans le but d’encadrer la négociation afin de lui permettre de s’accomplir dans des conditions de loyauté et de confiance mutuelles des parties (mentionnées à nouveau par la loi El Khomri). On constate aujourd’hui que cet outil est peu utilisé et seulement dans le cadre d’accords spécifiques et non dans la définition des fondements du dialogue social intra-entreprise.
Ces accords de méthode permettraient de préciser davantage au niveau de l’entreprise (et pourra être précisé par la suite par des accords de méthode spécifiques le cas échéant) :
- La nature des informations partagées entre les négociateurs : informations relatives à la méthode de négociation (calendrier social, lieux des réunions, information des salariés sur le contenu des négociations en cours, modalités selon lesquelles sont suivis les engagements souscrits par les parties, informations mises à disposition (BDES°)…) et/ou informations relatives au contenu de la négociation (thèmes des négociations, périodicité et contenu de chacun des thèmes…)
- Les principales étapes du déroulement des négociations et un calendrier social optimisé pour les années à venir (thématiques à aborder dans l’année, le suivi des dates de renégociation des accords par thématique et la périodicité de ces renégociations…)
Malgré l’absence de mention explicite des accords de méthode dans les ordonnances publiées le 31 août 2017, on comprend implicitement à travers leur contenu et la forte volonté de replacer l’entreprise au cœur du dialogue social, tout en la rendant autonome, l’importance qu’ils peuvent revêtir.
La généralisation des accords de méthode au niveau de l’entreprise devient un levier majeur de la négociation collective au service de la performance sociale et économique. Les équipes RH en tant que garantes de sa mise en place et de son application doivent donc travailler davantage sur leur posture et développer leur capacité à négocier pour favoriser l’instauration d’un dialogue social efficace et constructif.
- Flore MATHIEU, consultante People & Change
- Benjamin NINOU, senior consultant People & Change
Super article ça !
William