Définir sa marque employeur dans un contexte de transition sociale, sociétale et environnementale

Wavestone en parlait déjà il y a 4 ans, la marque employeur a un réel un intérêt pour traverser une période de crise. Ce concept emprunté au marketing n’est pas récent : il est réinterrogé à l’aune des grandes transformations qui façonnent notre société. Dans un contexte de transition écologique, sociale et sociétale, les attentes des candidats et des collaborateurs sont fortes quant aux engagements pris par l’entreprise dans laquelle ils travaillent ou à laquelle ils postulent. La considération des enjeux sociaux, sociétaux et environnementaux fait désormais partie intégrante d’une démarche d’attractivité employeur et de fidélisation. 

Marque employeur et RSE sont intrinsèquement liées  

C’est aux Etats-Unis, dans les années 90, que le concept de marque employeur a été posé par les théoriciens Tim Ambler et Simon Barrow. L’ensemble  des chercheurs s’accordent aujourd’hui sur le fait qu’elle représente les « avantages potentiels qu’un employé voit dans le fait de travailler pour une organisation ». Les entreprises  entreprennent donc différentes actions plus ou moins structurées dans des plans d’actions RH , en vue de soigner leur image de marque auprès des candidats et des collaborateurs. Tout cela, dans une perspective d’amélioration de la perception que les salariés potentiels et actuels ont de l’entreprise.

Certains empruntent le concept des « 4 P » tiré du marketing produit, pour définir les piliers de la marque employeur. On parle alors des « 4 C » : travailler sa Culture d’entreprise ; soigner sa Communication interne et externe ; travailler la marque employeur en étroite Collaboration avec les collaborateurs en poste ; bien connaître les Candidats que l’on recherche et leur profil.

D’un autre côté, la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), a été définie dès les années 50 par Howard Bowen comme « La responsabilité sociale du businessman ». Aujourd’hui, elle est appréhendée comme un concept dans lequel les entreprises intègrent 3 préoccupations dans leurs activités : sociales, environnementales et économiques.

Plusieurs réglementations encadrent la notion de RSE : Reporting extra-financier (NFRD) ; Devoir de vigilance ; Objectifs de Développement Durable ; Loi Pacte, N orme ISO 26000 qui  pose les lignes directrices d’une démarche RSE. Certains de ces critères sont corrélés à la marque employeur :

  • La considération des droits humains: le respect du droit du travail, la lutte contre les discriminations, le respect des droits civiques
  • Les bonnes conditions et relations de travail: la protection sociale, les relations entre l’employeur et les employés, la santé et la sécurité au travail

Le volet social de la RSE permet donc de façonner  des éléments de politique RH. Plus largement, il est intrinsèquement lié à la marque employeur :

  1. La déclinaison d’une stratégie RSE renforce l’épanouissement et l’engagement des collaborateurs. L’implication qu’une entreprise a pour les questions environnementales, sociales et sociétales peut avoir des effets sur le sentiment d’appartenance des collaborateurs et donc, sur leur engagement. Une étude de Qualtrics, relayée sur le site de France Travail, met en avant qu’en 2022, 70% des collaborateurs estimaient que leur employeur avait nettement progressé au sujet de la RSE. Cependant, ils manifestaient leurs attentes au regard d’une vraie mobilisation sur tous les aspects de la RSE.
  2. La communication des valeurs et engagements RSE d’une entreprise permet d’attirer des talents : les candidats sont sensibles aux valeurs que véhicule l’entreprise pour laquelle ils postulent. Pour preuve, les jeunes diplômés posent de plus en plus de questions en entretien, relatives à la démarche RSE de l’entreprise dans laquelle ils candidatent. Les recruteurs doivent donc être outillés et en mesure de répondre à ces questions.
  3. Enfin, RSE et marque employeur sont gages de compétitivité vis-à-vis des concurrents d’une entreprise : au-delà des collaborateurs et des candidats, les clients d’une organisation attachent de l’importance quant à ses engagements sociaux, sociétaux et environnementaux.

Ainsi, les ambitions, stratégies et actions RSE d’une entreprise font désormais l’objet de comparaison avec ses concurrents de la part des collaborateurs, candidats et clients. Il est donc certain que la marque employeur et la RSE sont liées, en vue de définir des politiques RH et un écosystème organisationnel plus durables . Cependant, les critères inhérents au volet social d’une stratégie RSE n’étaient pas clairs et définis jusqu’à présent. L’arrivée de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) est venue poser un modèle de référence.  

La CSRD pose des critères sociaux de référence

La CSRD est applicable depuis le 1er janvier 2024. Elle fait partie du Pacte vert européen visant la neutralité carbone d’ici 2050. Elle impose de nouvelles obligations de reporting extra-financier, et prône la transparence des entreprises vis-à-vis de leurs actions, résultats et moyens mobilisés pour y parvenir. Elle est structurée autour de 3 thématiques ESG : Environnementale, Sociale et Gouvernance. Le pilier humain est constitué de 4 ESRS (European Sustainability Reporting Standards) :

Il a pour but d’évaluer et rendre plus transparent l’impact social des activités de l’entreprise. Au-delà d’une obligation légale et réglementaire, la CSRD doit être appréhendée comme une opportunité stratégique de repenser les politiques RH et l’approche de l’écosystème des effectifs, pour servir la marque employeur. En effet, les obligations de reporting considèrent de nouvelles catégories de parties prenantes et de nouvelles datas RH :

  • D’un côté, le S1 du volet social, relatif aux collaborateurs de l’entreprise, permet de dresser une liste de thématiques sur lesquelles travailler, en vue de notamment fidéliser et attirer les collaborateurs : garantir l’équilibre vie privée-vie professionnelle ; définir un système de rémunération attractif et équitable ; définir une politique de diversité, d’égalité et d’inclusion, porter un intérêt particulier à la formation et au développement des compétences…
  • D’un autre côté, les critères des volets S2, S3 et S4, relatifs aux actions mises en œuvre pour garantir de bonnes conditions de travail tout au long de la chaine de valeur d’une entreprise ; pour limiter l’impact des activités sur les communautés locales ou encore sur les consommateurs et utilisateurs finaux, ne sont pas directement liés à la politique RH. En revanche, ils peuvent pousser ou non des collaborateurs à rejoindre une entreprise et à y rester.

Cet environnement réglementaire favorise l’harmonisation et encourage l’adoption des meilleures pratiques comme levier de différenciation.

Jusqu’à présent, la marque employeur, partie intégrante de la politique RH, n’était pas auditée. Pour certifier ses actions, une entreprise devait demander, de son propre gré, une certification. Désormais, ces éléments seront audités et crédibilisés par des Commissaires aux comptes ou Organisme Tiers Indépendant (OIT), en dehors de toute démarche volontariste.

Toutefois, la CSRD est une Directive récente : les premiers reportings seront publiés dès 2025. Elle est en cours de mise en œuvre dans les entreprises qui en sont pour la plupart, à l’étape de collecte de la data et de l’analyse d’écarts entre les reportings RH actuels et le périmètre social de la norme.

L’enjeu pour la RH est désormais de s’emparer de la CSRD et des travaux menés dans le cadre du volet social pour prendre conscience des forces et faiblesses de sa marque employeur et connaitre les éléments sur lesquels travailler / communiquer en priorité. Ainsi, la marque employeur s’enrichit et doit être appréhendée sous l’angle des dispositifs et processus RH (processus de recrutement, gestion des compétences, QVT, digitalisation des processus RH…), mais également de la RSE et de la CSRD.

Manon GOURON,
Consultante
Agnès DOISY,
Senior Manager

Sources :

Marque employeur interne et externe | Cairn.info

Marque employeur : oui, oui et oui ! Mais pourquoi ? (welcometothejungle.com)

Stratégie RSE : définition et mise en place | Qualtrics

 

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