Quel est l’impact des startups d’Etat sur le service public de l’emploi ?

Pour faire face aux enjeux du marché du travail qui sont notamment le chômage, la formation professionnelle ou encore l’inadéquation des compétences, le service public de l’emploi a entamé une profonde transformation numérique. Dans ce cadre, les startups d’Etat proposent aux usagers des outils simples et innovants pour répondre à leurs besoins.

A cet effet, on peut se demander si la transformation numérique induite en partie par les startups d’Etat peut profondément améliorer le service public de l’emploi.

Le service public de l’emploi mis à l’épreuve par la reprise économique

 Dans un contexte de reprise économique post-pandémie, le marché du travail français connaît une baisse du chômage de 5,5 % pour la catégorie A[1] (personne sans emploi, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi) au troisième trimestre 2021. La France retrouve un niveau similaire à l’avant crise, avec 3,54 millions de demandeurs d’emploi de catégorie A sans activité.

Malgré un bilan économique plus que positif, les entreprises font face à des difficultés de recrutement. En effet, le marché du travail est bousculé par la pénurie de main d’œuvre qui s’est installée à l’aune de la reprise économique, en particulier dans certains secteurs davantage touchés par la crise (industrie, hôtellerie/restauration, culture, etc.). Cette nouvelle problématique oblige le service public de l’emploi[2] à s’adapter de nouveau à cette situation, même si elle était en partie déjà présente avant la crise sanitaire.

Graphique de l’Insee illustrant les difficultés de recrutement en France dans les services

(En % des effectifs l’activité)

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie des Finances et de la Relance, a appelé les entreprises des secteurs touchés par ces difficultés à se rendre plus attractives, notamment sur la rémunération, pour contribuer à cet effort collectif. La réforme de l’assurance-chômage, qui comprend un durcissement des règles, soutient cette idée en rendant les offres d’emploi plus attrayantes.

Pour autant, ce n’est pas la seule réponse que fournit le gouvernement pour lutter contre ce phénomène. Les startups d’Etat ont vu le jour il y a quelques années afin d’apporter une solution innovante et concrète au problème rencontré. C’est dans ce cadre qu’en 2015, Pôle emploi rejoint le réseau des incubateurs de startups d’Etat.

Vous pouvez retrouver les articles de Wavestone : « Les startups d’Etat et de Territoire comme levier d’innovation RH dans le secteur public » ou « Les Start-up d’Etat et le bouleversement d’une administration représentée par la DGAFP » pour en savoir plus sur le sujet des startups d’Etat.

Quel est l’impact des startups d’Etat sur l’amélioration du service public de l’emploi ?

Les startups d’Etat ont pour vocation de mettre en place des pratiques agiles au sein du secteur public pour concevoir des services numériques innovants. Nous allons donc nous intéresser à quatre startups qui ont été développées par la Fabrique de Pôle Emploi (incubateur interne) pour trouver des solutions facilitant le retour à l’emploi :

  • La Bonne Boîte cible les entreprises ayant des perspectives d’embauche élevées afin que le candidat ait un accès aux offres du marché dites cachées[3], qui représente environ 80 % des embauches.

Plus de 140 000 usagers ont trouvé un travail dans une entreprise référencée sur l’outil.

  • Maintenant! est à l’image de son slogan « Recruter des gens, pas des CV ! ». C’est un outil simple, rapide et innovant pour trouver un emploi ou un candidat. Plus besoin de CV et de lettre de motivation pour le candidat, ni de déposer une annonce pour l’entreprise. Selon les critères proposés par l’outil, le candidat et l’employeur sont mis très rapidement en relation si leurs réponses sont majoritairement similaires.
  • La Bonne Alternance analyse les offres et les recrutements des 6 dernières années pour proposer des entreprises qui recrutent régulièrement en alternance (contrat d’apprentissage ou contrat de professionnalisation). Le service expose également les formations disponibles en apprentissage.

Depuis l’ouverture du service en avril 2018, 1,73 million de visites ont eu lieu. En2021, environ 23 % des usagers ont entamé une candidature.

  • La Bonne Formation se veut être le premier annuaire complet des formations en France. On retrouve dans celui-ci des informations clés par formation :  le taux de Retour à l’Emploi, l’avis des anciens stagiaires, les offres d’emploi associées et un outil d’immersion pour découvrir un métier avant de se lancer.

2 millions de personnes ont consulté le détail des formations depuis son lancement, et 6 % des utilisateurs ont simulé un financement complet.

Ces outils répondent en effet aux objectifs de la création du dispositif des startups d’Etat. Chaque service numérique est innovant, simple d’utilisation et propose une solution concrète aux usagers. Cette approche « startup » dans les méthodes de travail et le développement de solution est efficiente et permet d’inciter les administrations à faire preuve d’agilité.

Cette analyse montre que la transformation numérique induite par les startups d’Etat bouscule le fonctionnement de l’administration, tout en améliorant le service public de l’emploi avec des outils inédits. Les statistiques des startups d’Etat (présentées ci-dessus en gras) permettent de mesurer l’impact des projets qui ont été développés par l’incubateur de Pôle emploi.

Des résultats concrets limités par le manque d’uniformisation

Plusieurs initiatives publiques qui s’appuient sur le numérique et des startups comme Wizbii (hors startups d’Etat) ont eu lieu en période post-pandémie pour améliorer le service public de l’emploi. La plateforme la plus connue reste à ce jour 1 jeune, 1 solution, lancée en août 2020 par le gouvernement pour accompagner, former et faciliter l’entrée dans la vie professionnelle des jeunes. Le chef de l’Etat a déclaré le 2 novembre 2021 qu’elle avait permis à 3 millions de jeunes de trouver un emploi depuis sa création (alternance, CDI, CDD, etc.). Les statistiques montrent l’impact de cet outil, qui souffre malgré tout d’offres « génériques » non adaptées au format du site rendant la lecture difficile.

Aujourd’hui, il est clair qu’un candidat ne manque pas de solutions pour augmenter ses chances de trouver un emploi. Quelques outils ont été énumérés dans cet article, mais la liste est encore longue si l’on compte ceux qui n’appartiennent pas à la famille des startups d’Etat.

Les équipes des startups d’Etat développent des outils en équipes isolées et autonomes où le manque d’harmonisation peut parfois se faire ressentir. Les outils sont certes efficaces et bien construits, mais trop nombreux et trop éparpillés. Par ailleurs, les nombreux outils également proposés par le secteur privé sur des domaines similaires (recrutement, formation, etc.) accentuent ce phénomène de « masse ». L’objectif serait de proposer à l’usager une plateforme simple et reconnue pour son efficacité, qui peut faire face à la grande majorité des problèmes liés à l’emploi. Centraliser les services numériques qu’offre le secteur public aux usagers sur une même plateforme permettrait d’exploiter davantage leur potentiel.

Ainsi, une stratégie gagnante pour le service public de l’emploi serait d’allier l’agilité et la capacité d’innovation des startups d’Etat à une centralisation des initiatives.


[1] Personne sans emploi, tenue d’accomplir des actes positifs de recherche d’emploi : Démarches régulières de recherche d’emploi pour lesquelles le demandeur d’emploi doit être en mesure de produire un justificatif (candidatures envoyées, participation à des sessions d’aide à la recherche d’un emploi…), à la recherche d’un emploi quel que soit le type de contrat (CDI, CDD, à temps plein, à temps partiel, temporaire ou saisonnier)

[2] Le service public de l’emploi (SPE) rassemble les acteurs publics et privés chargés de la mise en œuvre de la politique de l’emploi et de la formation professionnelle. Il est placé sous la tutelle du ministère chargé de l’emploi et de la formation professionnelle et dirigé par la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).

[3] Le marché caché, ce sont toutes les offres qui ne sont ni publiées, ni diffusées.

Cédric Blache Consultant
Anthony Guinot Senior Consultant

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